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Mandela pleure (Par Jean-Pierre Corréa)

Alors que Nelson Mandela donnait au monde entier des leçons de démocratie, de résilience, de dépassement et décidait de construire «La Nation Arc- en ciel », beaucoup d’africains se mirent à rêver d’une nouvelle terre promise, désespérés qu’ils étaient souvent des politiques de leurs propres pays. Ils étaient fiers de ces « africains » qui avaient arraché leur liberté au prix de tant de souffrances et de morts. Et puis cette libération était aussi un peu la leur, croyaient-ils naïvement.

Le Sénégal avait été le premier pays au monde, sous Senghor à reconnaître L’ANC et à lui permettre d’ouvrir un bureau à Dakar, distribuant à tous les exilés sud africains, souvent artistes, comme Dollar Brand ou Myriam Makéba, des passeports sénégalais. Ce qui se déroule actuellement à Johannesburg ou à Durban est indigne de l’héritage de Nelson Mandela.

Mais ses successeurs souvent juste préoccupés à s’enrichir, n’ont pas voulu voir ce feu qui couvait. Isolés du temps de l’apartheid, les Noirs sud-africains n’ont pas été préparés à l’arrivée de nombreux immigrés du reste du continent après 1994, notamment à l’afflux de Zimbabwéens chassés par la crise dans leur pays depuis 2000.

Ils seraient aujourd’hui 3 millions. Même si seulement 2 à 3%des criminels arrêtés par la police sont des étrangers, les Sud-Africains les rendent responsables de la forte criminalité. Même si l’apport de cette main d’œuvre étrangère, souvent plus qualifiée et dynamique que les locaux, est positif pour l’économie sud-africaine, les pauvres les accusent d’être responsables du taux de chômage de 40 %.

Le gouvernement a toujours minimisé les appels d’air créés par les crises notamment au Zimbabwe, ou par l’appel du business entendu par les nigérians, où simplement la liberté tranquille des sénégalais d’aller poser leur sens du négoce partout dans le monde. Le gouvernement sud africain minimise à présent le problème de la xénophobie.

Et si les nigérians, Zimbabwéens, sénégalais, congolais, se mettaient à immoler les sud-africains qui sont dans leurs pays, quel spectacle donnerait-on au monde, spectacle qui c’est sûr, arrachera des larmes à Nelson Mandela, dont Achille Mbembé se réclame quand il écrit d’une plume désespérée « qu’aucun Africain n’est un étranger en Afrique ! Aucun Africain n’est un immigré en Afrique ! Nous avons tous notre place en Afrique, et peu importent nos aberrantes frontières nationales.

Et aucun national-chauvinisme, aussi effréné soit-il, n’y pourra rien. Et toutes les expulsions, aussi nombreuses soient-elles, n’y pourront rien. Au lieu de répandre du sang noir dans les rues de Jo’Burg, nous devrions tous nous atteler à la reconstruction de ce continent, et faire sortir l’Afrique de sa longue histoire douloureuse – pour en finir avec cette histoire qui depuis trop longtemps voudrait, quelle que soit l’époque, quel que soit l’endroit, qu’on ait tort d’être noir ». Devrons-nous continuer avec cette furieuse bêtise qui nous colle aux basques, à verser des larmes de sang sur cette terre déjà tellement balafrée par nos propres turpitudes et nos assourdissantes lâchetés ? Le monde nous regarde goguenard…

A nous de voir…

Jean-Pierre Corréa

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