Philippe Bohn atterrit chez Aigle Azur
Aigle Azur est au coeur d’un imbroglio, un de ses actionnaires ayant annoncé lundi avoir pris la présidence de la compagnie aérienne en difficultés, évinçant Frantz Yvelin de ce poste, avant d’être démenti par un autre porteur l’accusant d’usurper ce titre.
« Gérard Houa assure désormais la présidence d’Aigle Azur et Philippe Bohn la fonction de directeur général », ont indiqué ces deux hommes lundi matin dans un communiqué à en-tête de la compagnie.
« Gérard Houa, propriétaire de Lu Azur, actionnaire engagé et responsable, a réuni, après de longs mois d’efforts, 15 millions d’euros et une nouvelle équipe de management expérimentée pour mettre en oeuvre le sauvetage de la compagnie », selon la même source.
Aigle Azur est détenue par le groupe chinois HNA (49%), l’homme d’affaires américain David Neeleman (32%) et la compagnie Lu Azur (19%).
« Errements stratégiques »
« Les errements stratégiques des deux dernières années doivent cesser », ont-ils écrit, en visant M. Yvelin qui avait pris les commandes de la compagnie en septembre 2017 et avait reproché à la mi-août à ses actionnaires de l’avoir « abandonnée ».
« Les actionnaires ont longtemps été tenus dans l’ignorance » de la situation de l’entreprise « alors que dans le même temps la direction annonçait l’objectif d’un résultat à l’équilibre, voire légèrement excédentaire », ont ajouté les deux hommes dans le communiqué. Selon eux, « entre novembre 2017 et juin 2019, Aigle Azur a perdu plus de 50 millions d’euros ».
Mais M. Neelman a réfuté cette version. « Je n’ai pas licencié Frantz Yvelin, qui est toujours président d’Aigle Azur et je déments le pouvoir et les allégations de Gérard Houa » qui annonce « publiquement être être le président d’Aigle Azur », a indiqué M. Neeleman dans un mail en anglais envoyé à son avocate et dont l’AFP a obtenu une copie, confirmant une information du journal Les Echos.
« Je déments également le pouvoir et la nomination de Philippe Bohn », ajoute-t-il, annonçant son « intention d’engager une action judiciaire contre M. Houa pour usurpation de la présidence d’Aigle Azur, perturbation des opérations et menaces pour les chances de survie de la compagnie ».
Il affirme s’être entretenu avec l’actionnaire chinois HNA qui « n’avait pas connaissance au préalable de l’action de Gérard (Houa, NDLR) et désapprouve ce qu’il a tenté de faire », a-t-il ajouté.
Cession de dessertes remise en cause?
A la mi-août, M. Yvelin avait annoncé qu’Aigle Azur se préparait à céder ses dessertes au Portugal à la low-cost Vueling pour garantir sa survie à moyen-terme, sans impact social, reconnaissant qu' »à l’instar d’à peu près toutes les compagnies françaises, nous avons des difficultés ».
« Je me suis battu pendant des mois contre la majorité de mon actionnariat, qui nous a lâchement abandonnés », avait-il déploré dans un entretien à l’AFP.
Contacté par l’AFP lundi, M. Yvelin n’a pas souhaité réagir dans l’immédiat.
« Toute initiative qui démantèlerait l’entreprise est définitivement écartée », a expliqué M. Bohn à l’AFP, en référence à la cession des activités au Portugal, estimant que « vendre des actifs serait détruire l’entreprise ».
« L’ensemble des personnels était très hostile à cette solution », a-t-il ajouté, précisant qu’un comité d’entreprise s’était tenu lundi matin. « L’idée c’est d’assurer la pérennité » de la compagnie et de « préserver les actifs humains et matériels », a ajouté M. Bohn, qui a été directeur général d’Air Sénégal jusqu’en avril.
Aigle Azur, fondée en 1946 et dont les liaisons avec l’Algérie représentent 50% à 60% de l’activité, emploie 1.150 salariés dont 350 en Algérie.
Elle dispose d’une flotte de 11 avions -dont neuf A320 et deux long-courrier A330 en leasing – et a transporté 1,88 million de passagers en 2018.
Elle a réalisé un chiffre d’affaires de 300 millions d’euros en 2018 mais « perd de l’argent depuis 2012 », selon M. Yvelin. En août, elle disposait de près de 25 millions d’euros de trésorerie.
(avec AFP)
Source : Challenges