Quelles conséquences liées au retrait des pays de l’Alliance des états du Sahel de la CEDEAO ?
Le retrait des États du Sahel (Burkina Faso, Mali et Niger) de la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO) est une décision historique et controversée, qui pourrait avoir des conséquences importantes sur le plan politique, économique et sécuritaire. Voici quelques éléments d’analyse sur les raisons et les enjeux de ce choix stratégique.
Les raisons du retrait
Les trois pays du Sahel, qui font partie des membres fondateurs de la CEDEAO en 1975, ont annoncé leur retrait le 28 janvier 2024, par un communiqué conjoint et simultané. Ils ont invoqué plusieurs motifs pour justifier leur décision, notamment :
- L’éloignement des idéaux des pères fondateurs et du panafricanisme, qui auraient été trahis par la CEDEAO au profit d’intérêts étrangers.
- L’influence de puissances extérieures, notamment la France, qui serait devenue une menace pour la souveraineté et la stabilité des États du Sahel.
- L’imposition de sanctions « illégales, illégitimes, inhumaines et irresponsables » par la CEDEAO, en violation de ses propres textes, à l’encontre du Mali et du Niger, suite aux coups d’État militaires qui ont renversé les régimes civils en 2020 et 2023.
- L’indifférence de la CEDEAO face aux massacres des populations civiles et militaires, à la crise humanitaire et aux tentatives de déstabilisation des États du Sahel par les groupes jihadistes liés à Al-Qaïda ou à l’État islamique.
Les trois pays du Sahel ont affirmé que leur retrait était une décision « mûrement réfléchie » et qu’il répondait à des aspirations de « souveraineté totale ». Ils ont également annoncé leur volonté de renforcer leur coopération au sein de l’Alliance des États du Sahel (AES), créée en septembre 2023 pour lutter contre le terrorisme.
Les enjeux du retrait
Le retrait des États du Sahel de la CEDEAO est un événement sans précédent dans l’histoire de l’intégration régionale en Afrique de l’Ouest. Il pose plusieurs questions sur les conséquences possibles de cette rupture, tant pour les pays concernés que pour l’ensemble de la sous-région. Parmi les principaux enjeux, on peut citer :
- Le risque d’isolement et de marginalisation des États du Sahel, qui se privent d’un espace de dialogue et de solidarité avec leurs voisins ouest-africains, ainsi que d’un accès au marché commun et à la monnaie unique de la CEDEAO.
- Le coût économique et social du retrait, qui pourrait entraîner une hausse des droits de douane, des frais de transit et de transport, et affecter les échanges commerciaux, les investissements, les flux migratoires et les transferts de fonds entre les pays membres et non membres de la CEDEAO.
- Le défi sécuritaire du retrait, qui pourrait compromettre la coordination et l’efficacité des opérations militaires conjointes contre les groupes jihadistes, ainsi que la mise en œuvre des initiatives régionales de prévention et de résolution des conflits.
- La réaction de la CEDEAO et de l’Union africaine face au retrait, qui pourrait être soit conciliante soit ferme, selon le degré de compréhension ou de condamnation qu’elles exprimeront à l’égard des États du Sahel.
- L’impact du retrait sur le projet d’intégration régionale en Afrique de l’Ouest, qui pourrait être remis en cause ou relancé par cette crise majeure.